Un méthaniseur peut générer un revenu supplémentaire important pour un agriculteur.
GRDF
Le biogaz progresse de façon spectaculaire, au point qu’il apparaît désormais incontournable dans la transition énergétique bas carbone.
« Pas besoin de faire 5 000 km pour se fournir en gaz russe : des gisements existent et produisent déjà du gaz vert à moins de 50 km de chez vous » : le message porté par Guilhem Armanet est volontairement provocateur. Le directeur régional de GRDF en Auvergne-Rhône-Alpes (1 650 salariés) se prend même à rêver : « En 2023, j’aimerais voir naviguer un bateau au bioGNV sur l’un de nos fleuves. Et assister au lancement d’un projet de rétrofit train : une conversion de TER au diesel, polluants et chers, en TER roulant au bioGNV ».
On n’imaginait pas un tel potentiel
Bref rappel. La méthanisation des résidus de l’agriculture, de l’industrie agroalimentaire, des effluents d’élevage, des boues de stations d’épuration ou encore de déchets des collectivités, permet de produire du biogaz qui atteint le même niveau de qualité que le gaz naturel et qui peut donc être injecté dans les canalisations existantes sans autre transformation ni aucun changement d’appareils (chaudières, chaufferies) dans le bâtiment et les entreprises. Ce biométhane, issu de déchets, affiche un bilan carbone quasi neutre et répond à bon nombre d’enjeux énergétiques actuels : indépendance, économie circulaire, emplois non-délocalisables et... production d’un engrais naturel, le digestat, qui peut se substituer aux engrais minéraux d’origine fossile.
En France, la production de biogaz progresse à une vitesse spectaculaire. On n’imaginait pas un tel potentiel. En 2010, aucun méthaniseur n’était encore relié au réseau sur le territoire français. Ils étaient trois en 2013. On en compte aujourd’hui plus de 540 dans l’Hexagone et ils seront 654 d’ici la fin de l’année 2023 ! S’ils représentent l’équivalent de la production de deux réacteurs nucléaires à ce jour, ils pourraient produire l’équivalent de 11 réacteurs d’ici 2030. Guilhem Armanet ne cache pas son enthousiasme : « Nous entamons une troisième révolution. Après le gaz de houille au siècle dernier puis le gaz naturel importé de Russie, d’Algérie ou des pays du Golfe, nous vivons l’émergence du biométhane ».
Facteur de souveraineté énergétique
Les promoteurs du gaz vert soulignent aussi qu’il constitue un revenu complémentaire important pour les agriculteurs. Ils observent aussi que le biométhane convainc de plus en plus les élus locaux qui y voient un outil d’économie circulaire, de création d’emploi local et d’aménagement de leur territoire, sans même parler d’autonomie énergétique. Les oppositions locales, elles, restent rares.
Les tendances actuelles du biogaz pourront enfin être accélérées par de nouvelles technologies encore en phase de R&D, comme la gazéification du bois et autres matières combustibles récupérées dans les déchetteries, pour un potentiel évalué par l’Ademe au tiers de la consommation de gaz de la France. Les professionnels de la filière estiment ainsi que la production de gaz verts en France pourrait dépasser, en 2050, les besoins français en gaz.
En Auvergne Rhône-Alpes, un écosystème complet
La région ne fait pas exception à l’engouement général. Actuellement, 45 méthaniseurs sont actifs en Auvergne Rhône-Alpes, contre 30 en 2021. Malgré la hausse du coût des projets, onze unités supplémentaires verront le jour cette année, sur les 117 projets recensés. La région dispose également d’un écosystème complet, avec des centres de recherche et des entreprises de premier plan (Prodeval, Waga Energy, Deltalys...). Comme ailleurs, elle accélère la mise en place de stations publiques GNV et bioGNV sur son territoire : on en compte actuellement 25 qui servent 5 355 véhicules en circulation (bennes à ordures ménagères, camionnettes, véhicules de transport de marchandises et de voyageurs...), avec un rythme d’une dizaine de nouvelles stations chaque année.