Sophie Rivoire, cofondatrice de MagREEsource, au Forum 5i de Grenoble.
V. Riberolles
La jeune société grenobloise MagREEsource ambitionne de créer une filière de recyclage des aimants, en France puis en Europe. Elle entre en phase de levée de fonds pour installer une usine pilote d’ici le début 2022.
Le projet de la société MagREEsource est pour le moins ambitieux. Jeune spin-off du CNRS-Institut Néel (Grenoble), l’entreprise a été créée après une phase de maturation puis d’incubation auprès de la SATT Linksium. Les trois associés fondateurs, Sophie Rivoire, Éric Petit et Stéphane Mazerand, veulent créer une filière complète de recyclage des aimants.
Des fonds pour une usine pilote
L’équipe a présenté son projet industriel à des investisseurs lors du dernier Forum 5i de Grenoble. L’enjeu est désormais de trouver près de 15 millions d’euros afin de lancer la construction d’une usine pilote. D’une capacité de production d’aimants recyclés de 500 tonnes par an, elle pourrait entrer en activité dans le courant de l’année 2022.
L'hydrogène pour recycler les aimants usagés
À l’origine de ce projet inédit, une découverte de Sophie Rivoire lorsqu’elle était chercheure au CNRS. Elle met alors au point un système de séparation des éléments composants les aimants. Placés dans un réacteur alimenté en hydrogène, ceux-ci en ressortent sous la forme d’une poudre métallique composée d'acier et de terres rares. En utilisant le principe du frittage, MagREEsource réutilise cette poudre et produit à la demande des aimants recyclés.
Une véritable boucle circulaire
Éléments incontournables des industriels de l’automobile, de la mobilité électrique, de la climatisation ou des éoliennes, tous les aimants en fin de vie ou non conformes, terminent actuellement dans le cycle standard du recyclage des métaux. Avec eux, les terres rares, si prisées, ne sont pas récupérées. MagREEsource propose aujourd’hui de tout reprendre dans une boucle circulaire homogène.
Construire une vraie usine métallurgique
Un gros travail est en cours de finalisation afin de caractériser les gisements français et les quantités susceptibles d’être collectées. La société grenobloise travaille dans le cadre du programme « Collecte des aimants permanents » avec l’Ademe, la DGE (Direction Générale des Entreprises) et des recycleurs comme Suez, Paprec, Veolia ou Indra. Désormais, elle veut passer à l’étape de pré-industrialisation avec un site pilote à Grenoble. « Nous voulons une usine de métallurgie. Son concept sera dupliqué près des ressources. »
Une alternative de qualité à la mainmise chinoise
Le message a séduit le gouvernement : la société a reçu, dans le cadre du Plan France Relance, une subvention de 750.000 euros. Reste à convaincre les investisseurs. À la question du prix des aimants recyclés, s’agrègent des paramètres qu’Éric Petit CEO de MagREEsource et transfuge d’Eramet et de Pechiney, souligne : « Aujourd’hui, tout vient de Chine avec des problèmes de qualité, un manque d’expertise des produits livrés », sans oublier une logistique et un service client aléatoires.
80.000 tonnes par an de déchets d'aimants
MagREEsource vise « quelques pourcents » du marché mondial des aimants. La ressource existe : le volume de rebuts d’aimants est estimé à 80.000 tonnes par an à l’horizon 2030, selon une étude d’Adamas Intelligence. Après la France, la start-up veut installer son modèle en Allemagne, principal marché consommateur en Europe.